La réparation, le reconditionné et une écofiscalité pour favoriser l’économie circulaire

Nathalie Dubois, directrice juridique de Fnac Darty et membre du Cercle Montesquieu. L’auteure souligne que le passage d’une économie linéaire à une économie circulaire a un coût et plaide pour une écofiscalité incitative qui contribuerait à orienter les comportements. 

Une occasion manquée ne signifie pas forcément qu’une cause est perdue. La loi Anti-Gaspillage et pour l’Economie Circulaire (AGEC) avait pour objectif louable de s’attaquer à la gestion des déchets ; mais elle ne traitait pas de l’amont, c’est-à-dire de la meilleure manière d’éviter la création de déchets : la réparation, le reconditionné ou la seconde main. C’est sans doute la raison pour laquelle, lors de la discussion parlementaire le principe d’une TVA dite « circulaire » avait été écarté. Or, des instruments économiques incitatifs auraient un rôle important à jouer pour favoriser et accélérer le basculement de l’ensemble des parties prenantes vers une économie circulaire.  

Chacun est bien conscient de l’urgence des enjeux climatiques et nous savons tous qu’il faut davantage réemployer, réparer et allonger la durée de vie des biens. De plus en plus d’acteurs agissent en conséquence. Des consommateurs qui préfèrent acheter un seul tee-shirt sur un circuit de production locale plutôt que deux importés d’un pays à bas coût. Des fabricants qui développent des produits plus économes en impact environnemental ou s’engagent au maintien durable de pièces détachées pour lutter contre l’obsolescence. Des distributeurs qui mettent en avant les produits plus durables et instaurent des indices de réparabilité ou participent activement à la collecte de produits usagers même sans achat de neuf. 

La vertu gagne du terrain 

Oui, les mentalités et les pratiques évoluent. Oui, la vertu gagne du terrain. Mais il faut aller plus vite et plus loin et cela ne sera possible que si tous les maillons de la chaîne tirent dans le même sens : les consommateurs, les distributeurs, les fabricants, les associations, l’État, l’Europe. Avec, au final, la planète et les générations futures comme bénéficiaires ultimes. 

Cette sorte d’« union sacrée » aura d’autant plus de chances de se mettre en place et d’engendrer le cercle vertueux auquel tout le monde aspire que chacun des acteurs y trouvera son intérêt. Plus que par des injonctions, c’est en faisant converger l’économie et les valeurs que l’on aidera à généraliser et installer durablement les bonnes pratiques dans le quotidien des acteurs économiques et des consommateurs. Ainsi, la réflexion autour d’une écofiscalité incitative contribuerait à orienter les comportements. 

Un dispositif de « TVA circulaire » 

Intégrer la logique économique dans le processus est en effet indispensable car, ne nous y trompons pas, la transition environnementale pour passer d’une économie linéaire « produire, consommer, jeter » à une économie circulaire « réduire, réutiliser, recycler » a un coût, y compris pour le consommateur. Ainsi du « reconditionné » et de la « seconde main », qui pourraient, naturellement et logiquement, constituer une première étape vers un élargissement ultérieur et peut-être progressif du dispositif de la « TVA circulaire ». 

Le reconditionné et la seconde main sont aujourd’hui pénalisés par une taxation identique à celle du neuf. Il y aurait pourtant une imparable cohérence à ne taxer que la véritable valeur ajoutée, c’est-à-dire en exonérer le produit lui-même, qui a déjà été taxé lors de sa première mise en circulation. Il ne s’agirait somme toute que de l’application d’une logique similaire à celle qui conduit à mettre en place des dispositifs fiscaux pour éviter une double imposition de revenus. 

La réparation est une priorité 

La réparation, vertueuse car elle prolonge la durée de vie du bien en contribuant ainsi à la réduction des déchets, et créatrice d’emploi de proximité, est elle aussi pénalisée car elle est onéreuse en main-d’œuvre. Il est ainsi plus coûteux de rémunérer un technicien diplômé pour un diagnostic de réparation en France que de fabriquer à la chaîne dans des pays où la main-d’œuvre est à très bas coût. Il peut dès lors être plus rentable pour le consommateur selon le choix du bien, de racheter que de faire réparer. 

Or, selon l’échelle de Lansink qui hiérarchise les solutions préconisées pour le traitement de déchets, la réutilisation, donc la réparation, est une priorité pour l’économie circulaire. 

Pourquoi ne pas s’inspirer des initiatives de la Suède qui investit pour l’avenir avec la baisse de la TVA sur les réparations ? Elle encourage ainsi la réduction de la pollution et du gaspillage qui coûtent cher aux pouvoirs publics, et dynamise tout un pan de l’économie et de l’emploi basé sur la réparation, le recyclage et l’économie circulaire. 

Ne pas exclure les populations à faibles revenus 

Il ne fait aucun doute que des mécanismes fiscaux incitatifs seraient un puissant moteur pour accélérer la transition en stimulant la demande des consommateurs pour une consommation plus vertueuse et moins onéreuse. Entre le citoyen et le consommateur, il y a en effet le portefeuille. Et négliger la dimension sociale de la réflexion sur la stratégie de transition vers une économie plus circulaire serait injuste car excluant des populations à faibles revenus, et de ce fait inefficace. 

Utiliser le levier fiscal pour orienter l’épargne ou les dépenses dans des directions choisies est aussi ancien que les contributions. Il est ou a été utilisé avec succès dans d’innombrables secteurs, des énergies renouvelables à l’isolation des bâtiments en passant par les véhicules électriques ou même la production cinématographique. Pourquoi pas pour la réparation et les équipements éco-conçus, reconditionnés ou de seconde main, plus vertueux au plan environnemental ? 

Save of France fusionne avec Helpix of Belgium pour former le premier réseau d’ateliers de réparation de smartphones et tablettes en Belgique.

Non, ce n’est pas parce que l’écran de votre smartphone explose que vous devez le jeter.  

 Pas plus que si la batterie présente des signes de fatigue, il faut remiser l’appareil au fond d’un tiroir.  

 Quoi qu’il en soit, c’est dans le credo de Helpix et Save, deux réseaux de points de réparation pour smartphones et tablettes qui unissent leurs destins.  

Helpix, lancé dans le Brabant wallon il y a plus de 10 ans, compte une dizaine de magasins vendant en Wallonie et à Bruxelles et est spécialisé dans la vente de téléphones et tablettes.  

De son côté, Save est une entreprise française qui effectue également des réparations immédiates, mais aussi des équipements reconditionnés.  

Le groupe s’est implanté en Belgique en 2020 grâce à une master franchise accordée à Studio Group, qui gère également une vingtaine de points de vente de Proximus et Samsung.  

Numéro un en Belgique  

Les deux unités consolident leurs opérations sous la marque Save pour porter le réseau à 17 emplacements et les réparations existantes, avec pour ambition d’étendre encore la franchise, notamment en Flandre, en doublant le nombre d’emplacements d’ici 2024.  

Il est déjà le plus grand réseau en Belgique, dans un marché encore très morcelé.  

Save est détenu par l’assureur français SPB, très actif dans les contrats d’assurances pour des produits high-tech et dans les extensions de garantie.  

La chaîne, qui aura une bannière Save ce mois-ci, vise un chiffre d’affaires de 2,5 euros cette année et le double d’ici 2022.  

3 millions de smartphones  

“Actuellement, il se vend près de 3 millions de smartphones par an en Belgique.  

Les modèles ont une période de renouvellement d’environ 18 ans”, note Frédéric Loriers, PDG de Save en Belgique.  

“Cela représente un volume considérable de smartphones qui ne sont en général plus utilisés, simplement parce que le propriétaire de la dernière version, ou parce qu’il est abimé ou panne.”  

Un volume que vise clairement Save tant pour la réparation que pour le reconditionnement.  

“Nous ne ciblons pas les geeks qui désirent toujours la dernière version, mais les utilisateurs qui ne peuvent pas passer leur téléphone, mais qui n’ont pas un extensible”, poursuit Nicolas Henroz, le directeur général de Helpix.  

Quand on sait que le prix d’un nouvel écran entre 129 et 349 euros, idem pour une batterie, réparateurs ont de quoi combattre les idées reçues, selon la réparation ne vaudrait pas le coût, par exemple.  

“85% des réparations portent sur l’écran.  

Vient ensuite la batterie.  

Ce sont des réparations qui nécessitent une demi-heure de précise Frédéric Loriers.  

Des réparations et bien plus  

Le Save Channel, dont le concept sera déployé dans le réseau Helpix au cours du mois de juillet, propose des réparations en magasin toutes les 40 minutes, des assurances, des accessoires de protection et surtout des appareils.L’appareil est garanti un an. et est vendu à un prix nettement plus abordable que les nouveaux modèles.  

Pour alimenter cette filière de recyclage et de remise en vente, Save vise le marché des entreprises.  

« Il s’agit d’une énorme quantité de modèles inutilisés, car ils sont mieux adaptés aux besoins de l’entreprise, mais ne sont pas nécessairement rétrogradés.  

Ils peuvent être reconditionnés pour un autre type d’utilisation ou simplement recyclés.  

Dans tous les cas, en les supprimant, l’entreprise en fera la promotion et posera un geste éco-responsable”, a déclaré Frédéric